Fiche de HILL ISMAIL Aden

picture_member_thumbnail
HILL ISMAIL Aden
Docteur - CPTC - 2022

Etude du comportement linguistique et du vouloir-dire de la langue en néoténie linguistique : le cas des locuteurs somalo-francophones djiboutiens

 

sous la direction de Sergueï Tchougounnikov

Résumé :

La présente thèse s’inscrit dans une nouvelle approche qui ressortit aux sciences cognitives en général et aux linguistiques cognitives en particulier. Cette approche, intitulée néoténie linguistique et fondée par le linguiste Samir Bajrić, trouve son origine dans le domaine de la biologie développementale et plus particulièrement dans la théorie de la néoténie biologique proposée par Louis Bolk. Selon cette théorie, l’être humain est par nature un être dont le développement des capacités biologiques reste inachevé. Parallèlement à la description que fait cette théorie de la nature humaine, la néoténie linguistique décrit l’être-locuteur comme étant « un locuteur inachevé » possédant une ou plusieurs langue(s) qu’il ne peut acquérir entièrement. Ainsi, elle redéfinit les rapports cognitifs qui existent entre l’être-locuteur et les langues qu’il parle en rejetant la perfection en matière d’appropriation et d’aptitude linguistique. En d’autres termes, selon cette approche, aucun locuteur ne s’approprie une langue naturelle dans son entièreté. Ce faisant, elle s’éloigne des présupposés théoriques et populaires sous-jacents aux notions telles que « langue maternelle », « langue source », « langue natale », « langue seconde », « interlangue », « langue étrangère », « langue cible », « locuteur natif », « locuteur non natif » et propose sa propre terminologie dénuée de connotations ethnolinguistiques et axée seulement sur le degré de compétence qu’un locuteur peut acquérir dans la langue qu’il parle, s’approprie ou côtoie. En néoténie linguistique, les rapports cognitifs que ce locuteur peut entretenir avec ces langues sont définis par des notions telles que « langue in esse », « langue in fieri » et « langue in posse ». La première notion désigne toute langue dont on possède une intuition linguistique et des aptitudes communicatives développées. Inversement, la langue in posse constitue une langue dont on reconnaît à peine quelques sono rités. La langue in fieri désigne, quant à elle, toute langue dans laquelle le locuteur possède, à des degrés variables, des aptitudes de compréhension et d’expression sans qu’il n’en détienne un réel sentiment linguistique. Dans ce dernier cas de figure, ledit locuteur utilise cette langue avec des productions intralinguistiques peu autonomes. N’ayant pas encore acquis suffisamment l’autosuffisance qu’elle procure aux locuteurs confirmés qui la parlent, celui-ci l’utilise en étant influencé par les sources linguistiques d’une autre langue. Tel est le cas des locuteurs somalo-francophones djiboutiens quand ils font usage du français. Leurs comportements linguistiques contiennent à tous les niveaux (phonétique, phonologique, syntaxique et sémantique) des éléments propres au somali. Cette thèse aura donc pour objectif d’apporter une explication linguistique, sociolinguistique et cognitive à l’influence de cette langue dans la mise en œuvre du français par ces locuteurs.